6. La contre-attaque

Dans le chapitre précédent, nous avons vu comment parer l’attaque sur une pièce ou un pion. Il existe toutefois une alternative qui constitue l’une des plus grandes richesses du jeu et qui consiste … à ne pas parer l’attaque, mais lui préférer une contre-attaque ! Voyons un exemple.

Exemple 6.1 : ouverture du pion Roi

Après les coups 1. e4 e5  2. Cf3, le pion noir est attaqué et comme les autres parades sont exclues, on pourrait penser que la seule possibilité des Noirs est de le défendre par l’un des coups suivants :

2. …  Fd6   : un coup suspect car il bloque le jeu noir
2. …  f6      : la défense Damiano
2. …  Df6    : la défense Greco
2. …  d6     : la défense Philidor
2. …  De7   : la défense Gunderam
2. …  Cc6   : un coup menant à nombre de possibilités fréquemment jouées.

Mais les Noirs peuvent aussi décider d’abandonner le pion e5 à son triste sort et se concentrer sur leurs propres possibilités d’attaque. On parle alors de « contre-attaque » et c’est ce qui se passe dans la partie russe – ou défense Petrov -, qui continue par 2. …  Cf6 et dont l’idée est : « Ok, tu peux prendre mon pion e5 ; mais en contrepartie, je prendrai ton pion e4 »

Exemple 6.2  : contre-attaque Petrov

Ici, la contre-attaque se base sur une opportunité de la position. Mais les contre-attaques peuvent avoir lieu dans n’importe qu’elles parties de l’échiquier et d’une infinie variété de façons !

Nous avons vu précédemment que la défense de la cible est un moyen de parer une attaque : c’est une forme particulière de contre-attaque dirigée sur la cible, ou plus exactement sur l’attaquant qui se serait emparé de la cible. Mais la contre-attaque en général peut avoir n’importe quelle autre cible et ses objectifs peuvent être de différentes natures comme :

  1. Rendre l’attaque initiale inopérante (désorganiser)
  2. Récupérer la perte subie par l’attaque initiale (compenser)
  3. Faire échec perpétuel (annuler)
  4. Donner le mat (mater)

L’exemple suivant éclairera la notion de désorganisation :

Exemple 6.3 : contre-attaque de désorganisation

Dans la position ci-dessus, la Tour blanche en f4 est attaquée trois fois sans pouvoir fuir à cause du clouage, ni être défendue par la Dame blanche. Pourtant, les Blancs se sauvent en contre-attaquant la Dame noire, compte-tenu qu’elle ne peut pas prendre en premier :

La Tour blanche est libérée du clouage et ne risque plus rien : l’attaque noire a été désorganisée.

L’exemple suivant, illustre la notion de compensation :

Exemple 6.4 : contre-attaque de compensation

Les Noirs viennent de jouer Fc8-d7 avec l’intention de faire obstacle à l’influence du Ff3 par Fc6. Ce faisant, ils se placent devant la Dame noire et rendent ainsi la case d6 accessible. Les Blancs sautent sur l’occasion pour placer une attaque sur b7 par 1. Cd6 : attaqué deux fois par le Cd6 et le Ff3 et ne pouvant avancer sans exposer la Ta8 à l’attaque du Ff3, le pion b7 est perdu. Mais c’est sans compter sur la contre-attaque noire. La partie se poursuit ainsi :

2. … Db6
3. Cxb7 Tab8
4. h4 Fc6 (diagramme ci-contre)

Les trois coups utilisés par les Blancs pour s’emparer du pion noir ont été utilisés par les Noirs pour activer des pièces : la Db6, la Tb8 et le Fc6, ce qui en soit est déjà une compensation acceptable de trois temps pour un pion. Mais la partie continue par :

5. Fxc6 Dxc6
6. Ca5 Df3
7. Tc1 Dxg3+
8. Rh1 Dh3+

La contre-attaque a donné toute satisfaction : non seulement les Noirs ont récupéré leur pion, mais leur Dame est dans une position menaçante et leur Tour s’apprête à jouer dangereusement sur la colonne b.

Voici un autre exemple, illustrant cette fois la possibilité d’annuler :

Exemple 6.5 : contre-attaque de nulle

Dans la position ci-contre, les Noirs essuient une attaque double sur le Fou (cloué) et la Tour et aucune des parades ne fonctionne. Aussi jouent-ils :

1. …  Dh6
2. Dxc5 Dc1+

Et maintenant, quelle que soit la case de fuite choisie par le Roi, la Dame noire pourra (re)donner échec en c1, d2, f4, g5, h5 ou h6. C’est l’ « échec perpétuel » qui assure la partie nulle. Par exemple :

1. Rh2  Dh6+
2. Rg3 Dg5+
3. Rh3  Dh5+ etc.

Voyons enfin un dernier exemple de contre-attaque de mat.

Exemple 6.6 : contre-attaque de mat

Dans la position ci-contre, les Blancs sont menacés d’un mat en deux coups par D×f1+ suivi de Th1 mat. Plutôt que de chercher à s’en défendre, les Blancs contre-attaquent par un mat en trois coups :
1. Td6+ Fc6, 2. Txc6+ Ra5, 3. Da7 mat.

Le point sur l’analyse fractale

Nous découvrons dans ce chapitre qu’une action – ou une réaction – échiquéenne peut être a priori dissociée d’une autre en ce sens qu’elles n’ont pas de lien d’interaction apparent, comme une attaque peut être dissociée d’une contre-attaque, qui peut impliquer d’autres pièces et cibles, dans un autre secteur de l’échiquier.
Cela ne contredit toutefois pas l’aspect fractal de l’ensemble. En regardant une figure fractale comme celle ci-contre, nous pouvons en effet observer des éléments similaires en liaison avec le schéma initial, comme imbriqué avec lui, formant ainsi une structure hiérarchisée (une grande spirale par exemple), mais aussi des schémas se développant « parallèlement » au schéma initial (petites spirales), sans lien apparent avec lui.

Sur l’échiquier, tous ces schémas d’attaque « parallèles » se développent néanmoins suivant la même organisation « attaquant – mouvement – cible ».

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