3. Parer l’échec

Au Jeu d’échecs, quand le Roi est attaqué, on parle d’ « échec (au Roi) ». Dès lors, l’adversaire dispose seulement de trois parades pour empêcher que cette attaque n’aboutisse à l’abdication du Monarque. Voici ces trois façons de parer l’échec :

  1. Éliminer l’attaquant (Prendre)
  2. Empêcher l’attaquant d’atteindre sa cible (Interposer)
  3. Soustraire le Roi à l’attaque (Fuir)

Détaillons un peu chacune de ces options.

Prendre

C’est le moyen le plus simple et le plus évident pour parer l’échec : plus d’attaquant, plus d’attaque. En prenant la pièce qui attaque, on met fin à l’attaque. Attention, cette possibilité est exclue en cas d’attaque sur deux fronts, par deux pièces donc, puisque l’on ne peut prendre qu’une pièce par coup joué.

Interposer

Cette façon de parer l’échec utilise les règles du jeu pour empêcher que l’attaquant ne puisse atteindre sa cible. Cela implique de couper le trajet qui mène à la cible en y plaçant une pièce qui s’interpose entre l’attaquant et la cible. Notons que ne peut être parée ainsi ni l’attaque d’un cavalier qui a la faculté de « sauter » au-dessus des obstacles, ni l’attaque sur deux fronts. L’interposition est également impossible quand l’attaquant se trouve sur une case adjacente à la cible, ce qui est par exemple toujours le cas avec l’attaque d’un pion.

Fuir

La dernière possibilité pour parer l’échec est de déplacer le Roi de la case cible. Cette possibilité est la seule envisageable en cas d’attaque de deux pièces sur le Roi, ou double échec (à la découverte), raison qui rend une telle attaque si redoutable.

Prise de l’attaquant, Interposition d’une pièce ou Fuite sont les trois possibilités pour parer l’échec, ce que l’on mémorise par l’acronyme P.I.F.
Voyons maintenant un exemple.

Exemple 3.1 : le mat de Lucena (I)

Dans la position ci-contre, les blancs viennent de donner échec au Roi en jouant 1. Dc1-c4+ et la prise de la dame (P) étant ici impossible, il reste aux Noirs deux façons de parer l’échec :

  • soit 1. … Dd5 (Interposer)
  • soit 1. … Rh8, (Fuir) qui met, au moins temporairement, le Roi noir à l’abri de la Dame blanche.

À noter quand même que 1. … Rf8, une autre option de fuite, serait immédiatement sanctionné par :
2. Df7 mat.

Exemple 3.2 : le mat de Lucena (II)

Laquelle des deux possibilités choisir ? En fait, seule l’interposition par Dd5 est ici efficace et laisse une partie à peu près équilibrée. Par contre, la fuite Rh8 permet aux Blancs de placer une brillante combinaison de mat – dit « mat de Lucena », que nous allons examiner en détail.

Après 1. Dc4+ Rh8, les blancs continuent par 2. Cf7+. Nouvel échec, trois répliques à examiner : Prendre, Interposer ou Fuir (PIF). Mais notons que la nature de l’attaquant élimine d’emblée toute possibilité d’interposition puisque le déplacement d’un Cavalier n’est entravé par aucune pièce. Reste la prise, impossible ici, et pour finir la fuite : 2. … Rg8 (diagramme ci-contre).

Exemple 3.3 : le mat de Lucena (III)

Les blancs poursuivent maintenant par ce coup étonnant : 3. Ch6+ ! Les Noirs ne peuvent pas prendre le Cavalier blanc car en se déplaçant, ce dernier a libéré la diagonale sur laquelle la Dame blanche donne échec au Roi noir. Autrement dit, le Roi se trouve mis en échec à la fois par le Cavalier et la Dame : c’est un double échec ou plus précisément un échec double à la découverte. Impossible de prendre les deux pièces ni de parer simultanément leurs attaques conjointes ; il ne reste au Roi noir que l’option de la fuite : 3. … Rh8 , le coup Rf8 étant toujours impossible à cause du mat en f7 (diagramme ci-contre).

Tout semble maintenant en ordre pour les Noirs. Mais c’est sans compter sur la dernière ressource des blancs, un coup formidable :
4. Dg8+ !!!

Ici, ni fuite ni interposition, la seule option restant aux Noirs pour parer l’échec étant la prise de la Dame par 4. … T×g8 (la prise par le Roi est interdite par le Cavalier).

Exemple 3.4 : le mat de Lucena (IV)

Les Blancs ont-ils eu un coup de folie en sacrifiant leur Dame (diagramme ci-contre) ? Non, car maintenant 5. Cf7 gagne la partie. En effet, il apparaît rapidement qu’il n’y a plus maintenant aucun moyen de parer l’échec : interposer une pièce est vain – le Cavalier se moque bien de toutes les pièces qui entourent le Roi noir –, la prise est impossible et la fuite exclue : les Noirs sont mat, un schéma classique de mat souvent appelé « mat étouffé de Philidor ».

Récapitulons donc la suite de coups :

Le point sur l’analyse fractale

Lorsque la cible est le Roi, il est primordial de parer l’attaque. Nous voyons alors que la parade peut s’effectuer sur trois axes : l’attaquant, le mouvement de l’attaquant ou la cible elle-même. Cela n’est pas sans rapport avec la structure même d’un (demi) coup aux échecs qui a pour vocation de déplacer (mouvement) une pièce (attaquant) pour la poser sur une case (cible). Nous enrichissons donc notre vision d’une « action » échiquéenne par la prise en compte du mouvement de l’attaquant, mouvement auquel il est d’ailleurs possible de faire obstacle.

Ainsi se profile une loi fondamentale de l’analyse tactique par la prise en compte des trois aspects que sont la pièce qui attaque, son mouvement et la cible qu’elle essaie d’atteindre.

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